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Quand l’Histoire revit.

 

 

Noël approche. Le salon sent bon le sapin, les guirlandes illuminent les rues. En ce temps de célébrations et de traditions, la ville de Provins a une fois de plus décidé de ressusciter l’Histoire. Les samedi 14 et dimanche 15 décembre 2013, la citadelle médiévale a revêtu ses habits de fête pour remonter le temps.

 

La musique, les marrons chauds, et le froid qui rougit les joues. Pas de doute, l’hiver est là, Noël ne va pas tarder. Certains ont été organisés : les cadeaux sont prêts depuis Septembre. Pour d’autres, le manque de temps, d’argent et d’inspiration retarde toujours un peu plus l’échéance. Dans tous les cas, il y a toujours la possibilité de la trouvaille, du super cadeau de dernier minute qui fera malheur auprès de tante Monique. Les marchés de Noël apparaissent comme des solutions miraculeuses.

 

À Provins, il y avait déjà les Médiévales, la fête des Moissons ou, tout récemment, les Lueurs du temps. Il y a maintenant le Marché Médiéval de Noël. Voilà maintenant quatre années que l’association les R’mon temps organise cet événement qui ne cesse de se développer au fil des éditions. Ferronnerie, travail du cuir, calligraphie et cuisine médiévale sont ainsi réunies pour offrir aux visiteurs un hublot au travers duquel ils redécouvrent une époque décisive à la construction et au développement de cette cité.

 

C’est sur la place du Châtel que se déroulent principalement l’événement. Entre le parking (construit à l’entrée de la vieille ville, face aux portes de la muraille) et la place, plusieurs centaines d’années de décalage. Malgré le bitume et les réverbères, l’illusion fonctionne. Fidèle à l’imaginaire commun, le sol est recouvert d’une fine couche de paille fraîche. Entouré de ses joyeux compagnons et de sa meute de chiens, un seigneur traverse la rue pour rejoindre une échoppe où l’hydromel coule à flots. Là-bas, au fond, un autre est assis sur un banc. Consciencieux, il travaille son écriture et ses enluminures, tandis qu’une femme confectionne des bijoux. Pas de petits chalets en kit. Les échoppes sont faites de poutres en bois sur lesquelles on a suspendu des draps. Au total, une vingtaine d’artisans sont venus présenter leurs productions. Comparé aux énormes marchés de grandes villes de France, cela paraît peu. Pourtant, ici, quelque chose se dégage qu’il n’y a pas ailleurs. Il n’y a pas beaucoup de choses, mais tout est unique.

 

Une grande tente se démarque du reste. C’est le marchand de laine et de peaux. Sur ses étals, le synthétique est bien loin. Linges de maison, vêtements et peaux de bête rappellent un temps où tout se faisait à la main et la différence se sent. Rien à voir avec les couvertures que l’on achète dans le commerce. Celles-ci sont lourdes, immenses et douces. Le retour à l’authentique est alors fortement apprécié.

 

Au risque de s’attirer les foudres de Brigitte Bardo et de ses acolytes, les artisans du cuir eux-aussi, sont venus présenter leurs travaux. Et si aujourd’hui cuir rime avec ceinture, chaussure, sacs à main et siège de voiture, la production était autrefois beaucoup plus riche est variée. Eléments tout aussi important que le fer, le cuir avait ainsi une place déterminante dans la confection des armures, mais aussi dans les objets de la vie de tous les jours. C’est d’ailleurs chez les spécialistes de la ferronnerie que la visite se poursuit. Là encore, la richesse de la production marque le décalage entre les apriori populaires et les réalités historiques. Les collectionneurs peuvent se faire plaisir face à l’énorme collection d’armes et de pièces d’armure, mais l’étal ne se cantonne pas uniquement à cela. Coffrets précieux, bijoux, couvertures de livre, tout y est. Certains objets étaient attendus, d’autres surprennent un peu plus. « C’est beau » disent certains. « C’est impressionnant », disent d’autres. Romain, tout nouveau résident de la ville, est impressionné par les enluminures et le travail de la calligraphie. « C’est fou que des gens arrivent encore à faire des choses comme ça ! » déclare-t-il. Reproduisant les gestes ancestraux, la plume trace les lettres dans un style précieux qu’il est vital de préserver. En offrant tout cela, le vingt-et-unième siècle disparaît, faisant alors revivre pour quelques heures plusieurs siècles de la culture riche et pourtant méconnue du Moyen-Âge.

 

Mais pour faire vivre tout ce petit organisme, il faut aussi que les gens aient envie de venir. Quelques sacrifices sont alors à prévoir. L’hydromel c’est bien, mais la Heineken est une valeur plus sûre pour certaines personnes. Il en sera de même pour les ballades en poneys affublés de bonnets de Père Noël qui feront un bon compromis entre le plaisir des enfants et la tranquillité des parents. Malgré tout, l’effort mérite d’être salué. Certes, des accommodements ont été faits pour des besoins tout à fait capitalistes. Néanmoins, il paraît évident que le plaisir de partager et de faire revivre un moment une période de l’Histoire souvent vue sous un jour sombre et un peu barbare est bien présent.

 

Dimanche. 19 heures. La nuit vient de tomber. Les artisans rangent leurs trésors. Ils sont contents. Ils espéraient avoir du monde et il semble que les gens aient répondu présents à l’appel. D’ailleurs, ils ne sont pas les seuls à être reconnaissants à l’initiative de l’association les R’mon temps. Les commerçants de la ville haute, eux aussi, ont pu profiter du passage des touristes qui, en cette période de l’année, ont tendance à se faire plus rares. « L’été, il y a toujours du monde, raconte une commerçante, mais l’hiver c’est un peu mort. Le marché de Noël a été un bon coup de pouce dans la saison et on espère qu’il y aura d’autres initiatives de ce genre par la suite. » Allier patrimoine culturel et attraction touristique était un challenge. En ré-ouvrant momentanément une page de l’histoire, le marché de Noël a rempli ses objectifs. Le Moyen-Âge, ce week-end, s’est réveillé de sa torpeur.  

 

 

Amandine Duphil

03.01.2014

 

 

Marché Médiéval de Noël.

14 et 15 décembre 2013, 10 heures - 19 heures. Citadelle de Provins.

Entrée gratuite. www.provins.net et www.lesrmontemps.org

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