Vêtements intelligents, ça avance !
En plus d’être un lieu de découverte et d’expositions, la Cité des sciences et de l’industrie de la Villette est aussi un lieu de recherche où se réunissent de nombreuses équipes de travail. L’une d’elles se consacre actuellement à l’étude des vêtements intelligents et connectés. Une avancée que beaucoup attendent avec impatience.
Le LUTIN, Laboratoire des Usages en Technologies d’Information Numériques (ou petit génie malicieux de la nuit), participe avec d’autres laboratoires au projet “Homo textilus”. Après un an et demi de recherche, sur les trois ans prévus au total, ils ont fait appel à des volontaires pour participer à une expérience et faire avancer leurs réflexions. Ces volontaires sont recrutés sur le site du RISC, Relais d’Information sur les Sciences de la Cognition.
L’expérience se déroule à la Villette. Il est dix heures, le jeudi 27 février 2014, lorsque les participants sont réunis dans une salle au milieu des laboratoires. Ils sont une quinzaine, hommes et femmes, à avoir fait le déplacement. Tout ce qu’ils savent de l’expérience est le descriptif qu’ils ont reçu par mail, à savoir “L’objectif est d’observer les interactions sociales entre personnes équipées de vêtements connectés et leurs influences sur les comportements au sein d’un groupe”. Un certain mystère plane donc dans la pièce où toutes ces personnes sont reçues avec des jus de fruits et des biscuits de bienvenue tandis qu’ils ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés, l’objectif de la séance ne donnant aucun indice, ou presque, sur son déroulement.
Ce n’est qu’une fois tout le monde arrivé et installé, retardataires compris, que l’un des trois chercheurs représentants de l’étude présents prend la parole. “Tout d’abord, bonjour à tous et merci d’être venus. L’expérience va prendre la forme d’un jeu, qui durera une heure, grand maximum. Le but est simple : chacun va avoir une nouvelle identité et une personne-cible. A vous de retrouver la vôtre qui vous délivrera un message secret quand vous serez parvenu jusqu’à elle.” Dans le cadre de ce jeu, tous les participants doivent revêtir un tee-shirt sur lequel figurent des formes géométriques différentes dont la signification n’est pas donnée. Quatre groupes sont formés et se voient attribuer une couleur de tee-shirt propre. Avec le tee-shirt est fournie une enveloppe contenant nouvelle identité, personne-cible, lettres de recommandations pour aider les autres à atteindre leur personne-cible et message secret à délivrer à la personne dont on est la cible.
“Au début vous ne connaissez que les personnes qui figurent sur vos lettres de recommandation, c’est-à-dire celles qui sont vos amis dans le jeu. En allant de personne en personne, vous devez vous rapprocher et atteindre votre cible et lui demander le secret qu’elle a à vous donner. Pour l’atteindre vous devez demander à vos amis de vous recommander à quelqu’un et eux-mêmes ne peuvent vous recommander qu’à un ami de leur liste. Toutefois vous devez garder secrète votre cible, laquelle il vous faut trouver le plus rapidement possible.” Le jeu est terminé lorsque tout le monde a obtenu et délivré son message secret.
Après avoir éclairci quelques incompréhensions, les noms sont distribués, ainsi que les tee-shirts qui forment donc les équipes. Un tour de table au cours duquel tout le monde annonce son nouveau prénom est fait et le jeu démarre. Ou aurait dû démarrer. C’est alors que l’interlocuteur principal reprend la parole et annonce que deux personnes vont être sélectionnées au hasard pour porter un équipement particulier. Il s’agit de lunettes 3D reliées à un boîtier qui enregistre les mouvements oculaires de son porteur. Les deux personnes désignées procèdent à des réglages avec les chercheurs de l’équipe. Il s’agit de fixer un point donné de la salle tandis que sur l’ordinateur apparaît un point rouge qui doit correspondre au point regardé par la personne. Après quelques ajustements, les deux sont prêts et le jeu commence enfin.
Les parfaits inconnus rassemblés dans cette pièce se mettent à échanger, s’aidant les uns les autres à comprendre les règles apparemment obscures pour certains. Les participants hésitent, ne sont pas sûrs de savoir à qui ils ont le droit de s’adresser, ne savent pas trop comment demander leur recommandation sans dire de qui ils veulent se rapprocher et ne comprennent pas bien comment compléter leurs lettres de recommandation pré-remplies. Il est indéniable qu’il y a eu une part d’échec dans le déroulement de l’expérience au niveau de la communication.
Les deux individus équipés évoluent avec les autres sans aucune différence et malgré les difficultés, chacun finit par atteindre, plus ou moins vite, sa cible. Un participant peine plus que les autres, ce qui suscite quelques rires chez ceux qui ont trouvé en un rien de temps. Ce n’est qu’à ce moment que celui qui dirige principalement l’expérience, après avoir clôt le jeu, explique qu’il y avait des degrés de difficulté dans les parcours à effectuer et que le dernier avait reçu le plus difficile.
L’équipe demande aux participants de faire part des difficultés rencontrées, des observations éventuelles en vue d’une quelconque amélioration du jeu... Cela étant fait et après de nouveaux remerciements, la petite foule se dissout. L’un des deux participants ayant été équipé de lunettes 3D a souhaité témoigner.
“On ne voit rien de particulier avec les lunettes, ça ne change rien à l’expérience. Les chercheurs m’ont dit que ça leur servirait simplement à étudier les points sur lesquels s’attardaient mes yeux au cours des échanges avec les autres. Ça n’a l’air de rien pour l’instant mais je trouve que c’est très excitant pour la suite quand je pense à ces vêtements intelligents, c’est très prometteur. En revanche je n’ai pas bien vu l’utilité des figures géométriques sur les tee-shirts, personne ne s’en est servi”.
L’étude se poursuit, une nouvelle expérience aura lieu le 26 mars et les résultats des recherches seront diffusés prochainement.
Margot Da Silva
19.02.2014
