La fin qui fait la légende…
« Quand il a compris qu’il allait être empereur, il s’est mis à pleurer. » Trop jeune, trop affectueux, trop sensible, il aurait voulu vivre à la campagne, entouré de son épouse et de leurs nombreux enfants. Il deviendra souverain du plus grand empire restant au début du 20ème . L’homme qui se disait être « né sous une mauvaise étoile » aura finalement vu juste : il sera assassiné, tel un animal acculé, au fond d’une cave dans la petite ville d’Ekaterinbourg, en Sibérie. Pourtant, longtemps après, les mystères qui entourent cette mort ont beaucoup fait parler. A nouveau, le 25 février 2014, sur France 2, le journaliste Stéphane Bern a présenté dans son émission Secret d’Histoire, une des périodes sombres de l’Histoire occidentale. Retour sur la vie du dernier homme couronné de la famille royale de Russie : le tzar Nicolas II.
Juillet 1918, forêt de Koptiaki, lieu dit « Les quatre frères ». Un camion est garé sur un petit chemin de terre. Le jour n’est pas encore levé mais les hommes s’activent depuis déjà longtemps. D’ailleurs, ils ne se sont pas couchés. Toujours en habits militaires, ils jettent des corps au fond d’un ancien puits de mine. Ces derniers ont été dévêtus et découpés ; les visages ont quant à eux été aspergés d’acide afin de rendre toute identification impossible. Le lendemain du drame, les corps sont repêchés. Deux sont brûlés tandis que les autres sont enterrés dans une fosse commune à quelques kilomètres du premier lieu de dépôt. Au total, onze personnes trouvèrent la mort cette nuit-là puisqu’à la famille royale s’ajoutèrent les quelques fidèles ayant choisi de rester auprès d’eux jusqu’à la fin. En ce matin du 17 juillet 1918, la dernière autocratie d’Occident vient de s’éteindre.
Les mystères, plus ou moins sanglants, plus ou moins romanesques, qui tournèrent autour de l’histoire des Romanov firent couler beaucoup d’encre. On parla notamment longtemps de la lente agonie des filles du couple impérial qui avaient eu le malheur de coudre leurs bijoux sur leur corset. Mais la plus connue fut sans doute la légende de la survie de la Grande duchesse Anastasia. En 1920, dans un asile à Berlin, une jeune femme laissa ainsi planer le doute pendant un certain temps, revendiquant l’identité de la princesse héritière. Elles furent d’ailleurs nombreuses à tenter l’expérience, mais les tests ADN effectués une cinquantaine d’années plus tard furent formels. La famille Romanov avait bel et bien disparu.
Parcourant les palais affectionnés par le tzar et la tzarine, Stéphane Bern remonte le temps. De l’enfance du tzar à sa fin tragique en passant par sa rencontre avec celle qui sera toujours l’amour de sa vie, Secret d’Histoire retrace pas-à-pas les étapes déterminantes de la vie de cet homme qui n’avait au fond jamais voulu devenir empereur.
De la vie publique aux détails beaucoup plus intimes, l’émission dévoile au fil des reportages un homme profondément blessé par les aléas de la vie. Celui qui était prêt à tout donner pour le bien-être de sa famille vivait dans en décalage flagrant avec le reste de son temps. Tout comme il fut incapable d’empêcher sa femme de tomber dans les griffes de Raspoutine, les souffrances de son fils, hémophile, furent peut-être une raison de son aveuglement face à la détresse de son peuple. Dans tous les cas, c’est bien une succession de malentendus et de non-dits qui fut sans aucun doute la raison de son trépas. Alexandra Romanov était fascinée par Marie-Antoinette mais craignait de connaître le même destin. Il semble que cette peur se soit révélée justifiée.
Comme à son habitude, Stéphane Bern s’appuie sur des archives, photographiques et filmiques, ainsi que sur des reconstitutions cinématographiques pour revenir sur les faits qui ont construit la légende. Aucune des étapes déterminantes ne semble avoir été omise. En 120 minutes, au rythme de musiques de film, reportages exclusifs tournés dans des sites inconnus du grand public et interviews d’historiens, écrivains et conservateurs de musées spécialistes de la famille royale transportent d’année en année dans les dernières heures tumultueuses d’une page de l’Histoire de la Russie et de l’Europe.
Amandine Duphil
26.02.2014
